Fête iranienne

Où suis-je ? Indice. Paris, une salle à la déco kitsch, des effets lumineux un peu douteux et des femmes au maquillage prononcé accompagnées par des hommes ayant fait considérablement moins d'efforts. Les indices manquent encore un peu pour deviner mais je cède à la tentation de vous révéler la réponse. Nous sommes à une fête iranienne et célébrons le solstice d'hiver (Shab-e Yaldâ), une tradition qui remonte aux origines zoroastriennes de l'ancien Empire perse. Aujourd'hui en Iran, même si ce n'est pas un jour férié national pour des motifs religieux évidents, les familles continuent à se réunir et les chaînes de la TV d'Etat diffusent des programmes spéciaux à cette occasion. Les racines pré-islamiques de ce peuple sont si ancrées dans la mémoire collective, que même le régime actuel, par définition islamique, ne peut ignorer complètement cette tradition (Nb. sans pour autant en faire la promotion active). En cela, Shab-e Yaldâ illustre bien la complexité d'une identité nationale iranienne multiple et millénaire.

Mais revenons à notre soirée "parisienne". Un groupe de jeunes filles n'attend qu'une seule chose, se trémousser sur de la pop techno iranienne. D'ailleurs, c'est ce qu'elles font en reconnaissant les premières notes d'une chanson, mais DJ Mansour se ravise et on comprend à leurs mines déconfites qu'elles sont déçues. Mesdames il vous faudra être patientes, la salle se transformera en dancefloor seulement plus tard. En attendant, nous accueillons une danseuse professionnelle dont les mouvements et la tenue semblent s'inspirer de la tradition soufi, mais également du flamenco, ce qui est très perturbant. Quelle énergie...mais pourquoi bouge-t-elle ainsi dans tous les sens en secouant les bras ? Elle achève sa performance et je demeure sceptique.

Un dernier petit discours du maître de cérémonie pour nous souhaiter une très bonne soirée et la salle devient enfin piste de danse. Nul besoin de chercher un volontaire bien longtemps, ils sont nombreux à s'élancer pour se déhancher. Filles, garçons, jeunes et moins jeunes, tous dansent sans complexes en exprimant tout le potentiel de leur corps. Ils ont ça dans le sang. Moi aussi peut être, mais mes parents ne m'ont pas amené à beaucoup de soirées comme celle-ci et je n'ai pas l'habitude. Petit à petit je me détends, mais comment ne pas se sentir gauche quand ils dansent tous extrêmement bien à côté de moi ? Il faut prendre le pli du persian style dancing. C'est une technique bien particulière de gestes élégants des bras pour les femmes, on trouve plus de diversité côté hommes. J'avais déjà remarqué que les femmes se débrouillent généralement mieux que leur compagnon, ces derniers se retrouvent souvent à faire du sur place à leurs côtés. Mais ne généralisons pas, beaucoup dansent très bien et essaient de vous attirer au centre de leur cercle. Par moment un des participant se met à danser le pas traditionnel du nord ouest de l'Iran (i.e. les danses azéries) et c'est assez drôle de voir un homme de 50 ans le faire. L'expérience d'une fête iranienne est donc garantie 100% folklorique.